Carreaux catalans
Eau-forte
1990, 33 x 21 cm
Intensité
Eau-forte
1990, 85 x 63 cm
Bleu profond
Eau-forte
1990, 85 x 63 cm
Carborundum Rouge
2002, 21 x 15 cm
1971, 32,5 x 50 cm
1988 et 1990, 92 x 63 cm
"Il s'agit d'un accord qui se prend entre le poète et le peintre. Le premier propose un texte, le second une couleur. chacun choisit en quelque sorte l'autre. Je prévois la mise en page du poème et l'emplacement de mon interprétation picturale en sérigraphie."
Extrait d'une interview, réalisée en avril 2006 par Anne Gersten
1992 - 1998, 50 x 66 cm
"Aux messages d'union et de communication qu'amorce tel vers de Tahar Bekri ou de Lokenath Bhattacharya; à la spirale qu'esquisse le poème inuit ou le gaufrage du Braille entre la conscience de l'animal et celle de l'homme, entre le ressac et la pierre qui le cristallise, se superpose la structure des signes par le truchement desquels le cerveau ordonne à la main et lui fait répéter l'énoncé de ses concepts : calligraphie chinoise, persane, hébraïque, notation musicale, estampage pour les aveugles, reflets systématisés des dialectes. Cette beauté signifiante est saisie dans sa diversité, dans la spécificité de chacune de ses écritures. Jean-Luc Herman, en nous rendant visible sa constante nécessité, nous en notifie l'éruption primitive.
Du même foyer procède sa couleur. La savante combinaison de ses pigments l'exalte, ainsi que les contours où la resserre une géométrie allégorique. Plaque de résonance, l'écho de la création s'y résume. Un tel chromatisme participe de l'émission de l'universelle énergie."
François Chapon, mars 1998
réalisés entre 1996 et 1998, 92 x 65 cm
Voici nos oiseaux
Quittant leurs nids
Et la flamme de la vielle
Baissant la robe majestueuse
Nous rassemblons nos encensoirs
Pour l'union
Tahar Bekri
Traduit de l'arabe par l'auteur
Encore une heure de lumière
dans laquelle je peux m'asseoir
près de toi, te regarder
amour, tout amour,
voir comment près de ton épaule
le temps sur ton visage
passe transforme derrière nous
au bout du sable, l'eau
en un champ qui bouge près d'un champ
sur un champ et la lumière
se replie jaune, monte plus claire
s'allonge encore un peu
et bientôt disparaîtra
s'éteindra presque
Israël Eliraz
Traduit de l’hébreu par Esther Orner
Le premier son de la conque
Toi, terre, et vous, hommes, mes proches, ne me regardez pas maintenant. Pas encore.
Mon long chemin, les mots que je dis, ce souffle court : ignorer tout cela. Songez que l'écran de la nuit s'interpose, que ce que vous voyez ne peut être vu.
Toi, terre, et vous, hommes - mes proches -, laissez-moi d'abord me baigner, me vêtir d'un habit immaculé : que la mélodie solaire chante dans mes veines. Alors seulement levez les yeux.
Si vous le souhaitez, vous pourrez alors entendre le premier son de la conque, signe de notre union.
Lokenath Bhattacharrya
Traduit du bengali par l'auteur et Luc Grand-Didier
De la Quête du Bleu
Roue
Visage tout-puissant
Aisance de l'âme parmi les dents
Plaine
Science de la gazelle
Stabilité du corps sur le fil de l'espace
Prison de la forme prisonnière
Yadollah Royaï
Traduit du persan par Bernard Noël
Douze accords
pour un groupe d'instruments à hauteur déterminée
Le cercle peut être parcouru à partir de n'importe quel accord, dans l'un ou l'autre sens, chaque musicien évolue à son gré d'une hauteur à une autre de chaque accord, tantôt indépendamment, tantôt en réaction aux interventions de ses partenaires ; puis passe lentement, sans heurt, aux notes de l'accord suivant, de manière de plus en plus synchrone avec eux. Les caractères de jeu concernant les propriétés rythmiques et dynamiques se transforment insensiblement tout au long du parcours à travers les accords, au fil des initiatives successives des musiciens ; une sonorité des groupe aussi homogène que possible doit toutefois être conservée d'un bout à l'autre.
Un premier parcours circulaire achevé, les accords donnent lieu à des transpositions une octave plus haut et/ou plus bas, selon les possibilités des instruments, puis à des transpositions à des registres de plus en plus éloignés, lors de chaque reprise du parcours circulaire, jusqu'à couvrir l'ambitus le plus étendu.
On pourrait également concevoir qu'un coordinateur oriente le parcours des musiciens par un mouvement circulaire de ses bras, suggérant ainsi une vitesse de passage d'un accord à l'autre, voire modifiant en cours de route le sens du parcours. Les variations de vitesse (et de dynamique générale, selon des positions de mains déterminées au préalable) pourraient être déduites des irrégularités du cercle jaune inscrit au centre de la feuille, gestuellement "amplifiées".
Jean-Yves Bosseur, novembre 1996
Le monde pleure toujours
Il ne sait jamais ce qu'il veut
En été il se plaint qu'il fait chaud
En hiver il se plaint qu'il fait froid
Je vous demande ce que vaut cette vie
D'humains habités par le mal de vivre.
Assaleq Ag Ibrahim
Traduit du tifinar par l'auteur
En toute pierre, il est une vague
dont on n'aperçoit ni le
mouvement ni l'effervescente
fixité.
François Jacqmin
Transposé en braille par Daniel Dutrieux
Toutes les pages de tous les livres du monde
déchirées une à une
se transforment en bateaux de papier
posés sur la mer noire
la guerre commence
les menstrues de la mer
repeignent en rouge la surface de l'eau
dans le tumulte
les bateaux sombrent au fond des eaux
la tempête repêche dans la mer la civilisation
Ma Desheng
Traduit du chinois par un collectif
D'après ce qu'ils pensent, à travers un seul corps,
les humains s'aiment parce qu'ils savent que la
terre les a créés pour qu'ils soient compatissants
et qu'ils s'aiment profondément.
Pensée en mi'Kmaq, transcrite par Danielle-Eva Cyr
D'un chien à un homme
Petit homme tu ne sembles ni pressé ni anxieux lorsque nos routes se croisent nous sommes tous les deux heureux à la vue du jour nouveau.
Petit homme
grand merci
ton salut du matin
me ravit.
Taiviti Naullaq
Transcrit de la langue inuit par Michèle Therrien
Chute-du-vrai-dieu
c'est le nom de la falaise
rougie par les herbes folles
Ban'ya Natshuishi
Traduit du japonais par l'auteur
Vous demandez : "Pourquoi le monde ?"
Pourquoi un bout de chez soi ou d'ailleurs, cela ne ... suffisait-il pas ?
Mais POUR LES POETES LE MONDE c'est "UN BOUT DE CHEZ SOI" !
Le monde appartient aux poètes car eux seuls savent que la vie est poésie !
La vie au monde est défendue par deux sortes d'hommes ; et ils n'ont pas le droit ni à la lâcheté, ni aux compromissions.
Ce sont les guerriers et les poètes !
Les guerriers protègent le monde des hommes, chanté par les poètes.
Et si les guerriers reculent devant la peur, l'or ou la fourberie, alors ce sont de mauvais guerriers.
Si les poètes reculent devant leur faiblesse d'âme, le pouvoir ou l'argent, ce ne sont presque plus des poètes...
Car après avoir reculé, comme les mauvais guerriers, ils ne pourront plus servir honnêtement leur peuple, ils n'auront plus sa confiance.
Au travers de ce texte, je propose la fondation de la Ligue Mondiale pour le Combat et la Résistance Contre la lâcheté, la bassesse, la vilenie, la trahison et la traîtrise (LMCRClbvtt).
Tout le monde pourra devenir membre de cette Ligue, les GUERRIERS - POETES et les POETES - GUERRIERS, et aussi tous ceux qui sont prêts à se sacrifier pour les idéaux.
Paris le 30 mars 1997
Tolsty
Traduit du russe par Liudmila Kotliarov
N'attrapez pas la queue d'un léopard
et si vous l’attrapez ne la lâchez pas.
celui qui a été envoyé par une femme
n'a pas peur de la mort.
Si le sage se tait
on le prend pour un imbécile.
Proverbes éthiopiens transcrits par Makonnen
La pluie
Et la chaude pluie,-
Le charme de la bien-aimée
S'en ira, laissant un parfum de terre,
Le marais désséché
Oubliera la cascade de rires de l'amour.
...Et à nouveau reviendra la pluie enchanteresse,
Caracolant sur le cœur comme un poulain,
Elle s'en ira, telle la femme, et comme par avant,
Son rire étincellera dans la rue d'un autre
Et une âpre bouffée de solitude
Montera au plafond, chancelante, telle un homme ivre,
Le clair de lune du balcon et le poème d'amour,
Feront place à la pensée et à l'humidité.
La salle vide et éteinte...
Le motif ancien de la nappe dégarnie...
Te tendront la main comme le fait un bon copain
Telle une nature morte de Varazi.
Dato Magradzé
Traduit du géorgien par Nino Kalatozichvili
Les graphiques de Cerf
Cette planche illustre l'exploitation de diagrammes bien formalisés en mathématique.
C'est un aspect calligraphique et métaphorique du langage mathématique, allant au-delà de sa typographie classique, elle-même langage puissant et flexible. sur la planche, les graphiques forment un fond pour les formules ; ils ont joué, dans la topologie différentielle du mathématicien français Jean Cerf, un rôle quelque peu semblable aux diagrammes de R. Feynman dans la physique des particules.
C'est pourtant par analogie avec la notation musicale classique que le profane peut aisément aborder le graphique de Cerf. Ressemblance fondamentale : chacun décrit une activité qui se déroule dans le temps suivant un axe de temps allant de gauche à droite et un axe de hauteur allant de bas en haut. dans une portée musicale de 5 lignes, chaque ligne reste à la même hauteur. Par contre, dans un graphique de Cerf, les lignes ont le droit de monter et de descendre (sauf verticalement), et deux d'entre elles peuvent présenter un croisement. Plus surprenant, deux lignes peuvent s'unir en un temps t0, s'anéantissant mutuellement pour les temps t > t0 ; on appelle cela une mort. Symétriquement, deux lignes peuvent surgir ex nihilo en un temps et une hauteur donnés ; on appelle cela une naissance. A la place des notes sur une portée de musique, le graphique de Cerf porte sur chaque ligne un nombre entier ; c'est l'indice de la ligne. En un point de mort ou de naissance, la ligne inférieure ou la ligne supérieure doivent toujours avoir comme indices deux entiers successifs i et i+1. On a ainsi formalisé en termes purement calligraphiques la notion d'un graphique de Cerf.
Ces graphiques décrivent des phénomènes de la nature. Considérons la surface ondulante d'un lac (surface supposée toujours lisse partout, et plate au bord du lac). La hauteur de chaque sommet (ponctuel) de vague, suivi dans le temps, trace une ligne d'indice 2 ; celle de chaque creux de vague trace une ligne d'indice 0 ; et celle de chaque col de vague trace une ligne d'indice 1. On constate que l'ensemble de toutes ces lignes constitue un graphique de Cerf - sauf exceptions négligeables en un sens probabiliste.
Vers 1970, Jean Cerf a introduit ces graphiques pour démontrer rigoureusement l'existence (parlons en termes physiques) de certains écoulements lisses de liquides en grandes dimensions. Depuis lors, leurs interventions s'alignent, et s'appliquent même à des sujets arithmétiques et quantiques.
Laurent Siebenmann, 1998
Dans les ruines
mon âme rôde
ombre échappée
aux Enfers.
Ô de la nuit lumière latente
ô malheur
ce soir ma voix frémit
en des chants de mauve et d'or
mon souffle vagabond galope
abîme d’indicible destin.
Anges
nobles et naïfs
attendez
la joie est un mystère.
Dimitri Kraniotis
Traduit du grec par Michel Volkovitch